Archives par mot-clé : Kimono

Découverte de l’atelier de couture de Sakura Fabric – deco, origami and sewing

Présentation générale

J’ai eu le plaisir de visiter l’atelier de couture de Sakura Fabric – deco, origami and sewing tenu par Vanessa Maira, graphiste de formation.

Outre son activité, elle possède différents loisirs sur le côté : kendo depuis 15 ans, iaido depuis 3 ans et évidemment, c’est une passionnée du Japon : manga, culture, voyage, etc.  Imprégnée de cette culture, c’est en voyant les tissus japonais qu’elle eut envie de se lancer dans la couture en tant que loisir.

Comment a-t-elle appris la couture ?

Depuis toute petite, elle a baigné dans le monde de la couture : sa maman était couturière et travaillait dans les ateliers. Elle venait de temps en temps la chercher au travail le mercredi avec son papa et restait parfois dans l’atelier afin de regarder les autres travailler. Cette ambiance lui a vraiment plu et lui a laissé quantité de souvenirs positifs.

À côté, il y avait sa marraine qui avait son propre atelier de couture et avec qui elle a passé beaucoup de temps. Sa marraine a par la suite arrêté la couture pour travailler avec son mari mais elle a continué la couture en tant que hobby. C’est elle qui lui a beaucoup enseigné, notamment le début : comment rapiécer deux bouts de tissus, etc. avec une vielle machine à pédale avec laquelle Vanessa utilisait ses deux pieds quand elle était petite pour la faire fonctionner.

Quand Vanessa a vu les tissus Japonais, elle en a eu assez d’avoir des étuis à sabre standard où le tissu enveloppant le sabre avant de le mettre dans le sac dédié était « banal », « trop fin », « de mauvaise qualité », etc. Si l’on voulait avoir un bel étui ou avec un tissu plus épais, les prix montaient de manière affolante. Elle a alors décidé de créer les siens. D’abord avec des tissus style jacquard, elle a fait des tests « style japonisant » et voyait que cela passait bien. Quand les camarades des arts martiaux ont vu le résultat, ils ont vite demandé d’où ils venaient, où elle l’avait acheté etc. Vanessa leur a alors répondu que c’était elle qui les avait faits, c’est ainsi que l’aventure a démarré.

Comment son activité a débuté ?

L’aventure a donc commencé en fabriquant des étuis à shinai (sabre en bambou pour le kendo). Elle a testé des touts simples, puis a utilisé des tissus de plus en plus beaux et raffinés. Les clients ont poursuivi en lui demandant si elle faisait également des étuis à iaito (réplique de sabre en métal non tranchant pour la pratique du iaido). Elle a alors commencé par un modèle et voyant que cela fonctionnait, elle a continué avec ses produits. Elle réutilise les restes de tissus pour faire des pochettes et autres pièces de petites tailles. Elle essaye de réutiliser les chutes de tissus au maximum.

Elle a fait venir des tissus du Japon qui ont un certain prix, alors autant les utiliser au maximum. Les cotons japonais sont réputés pour être d’excellente qualité, ce n’est pas pour les jeter ! Plusieurs clients ont des tenugui (foulard multi fonction que l’on utilise dans la maison et sur la tête sous le casque – men – en kendo), qu’ils ont nettoyés plusieurs fois et les couleurs ne bougent pas. Vanessa est très contente de la qualité de ces tissus.

Pourquoi utiliser les kimonos d’arts martiaux ?

Au départ, Vanessa n’utilisait que des tissus qu’elle achetait et, en voyant un vieux kendo-gi (veste de kendo) qui était déchiré au niveau des épaules à cause du frottement des himo (cordes servant à faire tenir le plastron – do), elle s’est dit que ce serait dommage de le jeter à cause des épaules alors que les ¾ sont encore bons. Elle a donc essayé de le découper et de l’étaler pour voir la quantité de tissu disponible et a vu qu’il y avait moyen de le récupérer. Le premier truc qu’elle a fait est un sac qui se plie à l’image d’un sac de plage ou de course (style tote bag). Elle a également récupéré un ancien obi (ceinture de kimono) pour faire ce sac.

Pourquoi des créations en liens avec le Japon ?

Parce que Vanessa baigne dans la culture japonaise de par les arts martiaux qu’elle pratique, c’est sa source principale pour l’inspiration. Vu qu’elle utilise presque exclusivement des tissus japonais et/ou japonisants, elle voulait rester dans l’univers du Japon de par la qualité des tissus et les motifs utilisés. Ce sont de superbes tissus avec un choix énorme. Elle aime beaucoup les dessins ainsi que toutes les représentations que l’on peut voir dessus.

Quand elle coud un vieux obi, elle ne peut s’empêcher de penser à la personne qui l’a porté. Il y a toute une histoire derrière, tout comme pour les kendo-gi. Elle en reçoit de personnes plus ou moins connues dans le milieu du kendo et iaido. Quand on reçoit le kendo-gi ou hakama (pantalon large de kendo et iaido) d’un pratiquant avec une belle expérience et pratique, ce n’est pas rien ! Vanessa trouve que l’histoire de ces vêtements est fascinante et on ne peut que la rejoindre.

Pourquoi la récup’ ?

Vanessa trouve que l’on jette beaucoup, que nous sommes dans une société de consommation où il est facile d’acheter du neuf parce que ce n’est pas cher. C’est comme manger, elle déteste gaspiller de par son éducation. Nous avons la chance d’être dans des classes moyennes, d’avoir ce que l’on a et gaspiller n’est pas une option. Tant que nous avons des vêtements et des tissus, autant les garder et les réutiliser au maximum, les faire perdurer dans le temps à la place d’acheter du nouveau qui ne va pas peut-être pas durer aussi longtemps. C’est un peu de l’écologie mais c’est surtout un moyen de ne pas surconsommer.

Qu’est-ce qui l’inspire ?

Vous l’aurez compris, le Japon est fatalement sa source d’inspiration principale : les voyages qu’elle a y a faits, l’art en général (n’oublions pas qu’elle est graphiste), etc. Il y a également toutes les tendances asiatiques qui l’inspirent que ce soit pour la composition, les couleurs, la simplicité, la sobriété, etc. De ses propres dires, c’est comme le Scandinave qui est très épuré alors que le Japon est davantage dans la sobriété mais complexe. Les meilleurs exemples sont dans le vieux Kyôto, plus précisément dans le quartier de Gion où il y a de très vieilles boutiques avec que des artisans, ce qui l’inspire énormément.

Où trouve-t-elle les partons/modèles/tissus/Kimono ?

Pas de chance, en réalisant l’interview, j’espérais capter quelques sources pour les patrons et modèles mais Vanessa m’a confié n’en avoir aucun, elle les fait elle-même par essais-erreurs. Elle a un carnet où elle fait des croquis et reporte les mesures qu’elle doit utiliser pour les découpes des tissus et le prix général pour un client, toujours en fonction des tissus utilisés. Ainsi, elle connaît le métrage de tissus à utiliser et la charge de travail inhérente. Une fois la pièce créée, elle la soumet au client et à son mari pour consultation qui, pratiquant également les arts martiaux, peut donner des conseils sur la manière d’agencer les sacs, les pochettes (pour les tsuba par exemple- les gardes en plastique pour les shinai), les lanières, etc. afin d’améliorer ses créations et toujours répondre à une personnalisation des sacs selon chaque client, ses besoins et sa manière d’agencer/ranger son matériel.

Concernant les matériaux et les tissus, Vanessa trouve les obi au Japon. Il y a des magasins qui sont spécialisés dans les yukata et les kimono avec des seta (chaussures en paille). Souvent, dans le fond des boutiques, il y a un rayon de seconde main avec des obi. Il y a également des obi abimés à prix dérisoire alors qu’ils restent toujours aussi magnifiques. Par exemple, il y en avait un avec une brûlure de cigarette et un autre avec une tache. Les commerçants ne pouvaient par les vendre au prix habituel. Quand on pense qu’un véritable obi fait 6 à 8m, cela devient très intéressant. Sinon Vanessa trouve les autres tissus japonais et japonisants sur des sites spécialisés car il n’y a pas de boutique attitrée en Belgique. Pour les tissus plus génériques, comme du coton unis, elle trouve cela dans les merceries habituelles. Pour ce qui est des cuirs, elle a trouvé une astuce un peu récup’ également : un magasin qui fait des salons en cuir qui vend ses chutes de cuir à la caisse au kilo. Cela tombe bien pour Vanessa car elle n’a pas besoin de grand métrage. Cependant, c’est la surprise du chef concernant le contenu : si on prend une boîte colorée, on ne sait pas trop ce qu’il y aura dedans ou si on prend une boîte dans les tons noir ou brun, au saura alors plus ou moins ce que l’on aura. Cela permet pour le magasin de ne pas jeter les cuirs et pour Vanessa d’utiliser de beaux cuirs véritable et de qualité pour ses créations.

Où en est son projet ?

Le projet de Vanessa est toujours en amateur, pas en professionnel. Les clients peuvent voir ses créations et commander via sa page Facebook et sa page Instagram.

Comme c’est de la customisation, elle part du principe qu’il faut satisfaire le client. Les goûts et les couleurs, ça ne se discute pas. Comme elle est partie d’un sac à shinai qu’elle n’aimait pas, ce n’est pas elle qui vous jugera sur vos demandes de personnalisation ! Les clients choisissent tout : les tissus, les poches, leur position, la taille, etc. La clientèle de Vanessa est principalement composée de kendoka et iaidoka (pratiquants de kendo et d’iaido), en Belgique mais également à l’étranger.

Durant le confinement, elle a produit et vendu environs 300 masques faits à base de tissus japonais. Elle s’est adaptée durant cette période particulière. Vanessa propose parfois ses produits durant les séminaires, stages, championnats, etc., ce qui lui permet de tenir un stand et de faire la promotion de son artisanat.

Vanessa ne fait pas que de la couture mais également du tricot (snoods), des origamis, etc. Pour vous donner une idée, elle a fait un millier de grues en papier avec différentes couleurs pour la décoration des tables de son mariage. Un grand tonnerre d’applaudissements pour ses efforts et sa détermination !

Vanessa n’a pas d’objectif fixé concernant son projet car il a commencé pour le côté fun. Ses créations plaisent, elle a de plus en plus de retours positifs et elle commence à avoir de plus en plus de commandes. Cela lui fait plaisir de faire plaisir aux autres. Si les clients sont contents et satisfaits, elle continuera le temps qu’il faudra. Elle pense à se faire connaître davantage au niveau européen lors des évènements de kendo et de iaido et aller plus loin dans le concept de customisation, côté qui lui plaît le plus.

Elle a également développé une gamme pour animaux : collier, harnais, bandana, nœud papillon notamment en veste de kendo bleu indigo mais aussi avec des tissus japonais, parfait pour vos toutous !  Vanessa ne peut pas vivre pleinement de son projet mais s’il prend bien, peut-être que les choses changeront. Seul l’avenir nous le dira. Affaire et pages à suivre ! 

Vanessa peut compter sur le soutien de son mari pour améliorer les objets qu’elle crée et la gestion quotidienne ainsi que les conseils de sa mère et de sa marraine qui sont toutes deux couturières.

Quelles sont les difficultés qu’elle rencontre et a rencontrée ?

La principale difficulté rencontrée a été et est de se faire connaître. Au début, on se demande si cela va plaire au client, en particulier quand on n’est jamais assez satisfait de son travail. Elle voit toujours que l’on peut mieux faire. Elle n’est jamais satisfaite à 100% et cherche donc continuellement à s’améliorer.

La principale difficulté durant le covid est qu’elle commençait à avoir une notoriété dans le monde du kendo et tout s’est arrêté d’un coup, plus d’évènements, plus de kendo, plus rien pendant 2 ans et demi… Du coup, son activité a pris un coup et s’est recyclée, sans mauvais jeux de mots, dans la fabrication des masques. Elle a continué à faire sa promotion sur internet, à montrer qu’elle était toujours présente et montrer ses productions.

Quels conseils donnerait-elle à quelqu’un qui souhaite se lancer dans la couture ?

Si Vanessa devait donner un conseil pour quelqu’un qui souhaite se lancer dans la couture est la pratique. C’est comme le kendo, l’iaido et la vie en général : il faut se lancer, essayer, rater et réessayer encore jusqu’à satisfaction. Commencez par des choses faciles comme des tenugui, des furoshiki (emballage cadeau en coton de forme carrée), faites des ourlets, des petites pièces au début. Vous apprendrez en faisant des essais. Vous avez raté une pièce ? Ce n’est pas grave, recommencez autant de fois que nécessaire. C’est ainsi que se fait l’apprentissage. Prenez également des notes et répertoriez-les dans un carnet, avec les schémas, les cotes, les conseils etc. Une fois que vous êtes à l’aise, n’hésitez pas à sortir de votre zone de confort et innovez.

Une chose à ajouter ?

En parallèle de la couture, Vanessa se lance dans d’autres projets de décorations : origami, le dessin, la peinture tibétaine, etc. Elle est en recherche constante de nouveautés à explorer. Elle est à la recherche de quelque chose qui va plaire. La création est un besoin chez elle, sans quoi elle s’ennuie. C’est probablement dû à son métier de graphiste où il faut se creuser les méninges pour satisfaire le client. Partir d’une page blanche correspond à ce dont elle a besoin, tant dans son métier, que dans la couture et la vie de manière générale. La création nous oblige à nous surpasser mais ce n’est pas aussi stimulant que de « simplement » exécuter.

Un mot pour la fin ?

Pour clôturer cette interview, Vanessa m’a confié quelque chose de compliqué à appliquer : il faut croire en ses rêves et en ce que l’on fait. Même si pour certaines personnes c’est un peu plus dur que pour d’autres, il faut croire en soi et c’est valable pour tout car c’est cela qui nous aide à avancer.

Depuis qu’elle a passé son 4ème Dan en kendo, elle y arrive de plus en plus mais c’est un chemin long, compliqué et semé d’embuches. Si elle a obtenu le grade, malgré 7 tentatives auparavant (ce qui est tout à fait normal quand on arrive au 3ème, 4ème Dan et au-delà), elle se dit qu’elle peut avoir de plus en plus confiance en elle. Elle essaye, ce n’est pas toujours facile mais à force de persévérance, elle arrive à atteindre son but, que ce soit dans les arts martiaux, au travail, en couture et dans les autres domaines.

Voulez-vous en savoir plus ?

Vous pouvez aussi la contacter par mail à l’adresse suivante: info@sakurafabric.be

Crédit photo : Sakura Fabric par Vanessa Maira

Démonstration de kimono au Japan Film Festival in Brussels

Konnichiwa,
Il est temps de vous parler de ce que nous avons découvert avec beaucoup de plaisir lors des activités culturelles organisées autour du Japan Film Festival in Brussels.


Il y a beaucoup de choses à dire et c’est pourquoi nous avons pris la décision, Sébastien et moi, pour ces articles à 4 mains, de vous présenter une activité à la fois.

Pour commencer, celle pour laquelle nous avons fait le déplacement : la démonstration de Kimono avec Madame Hiromi Fujiwara avec l’aide du CISM.be. Vous trouverez toutes les données de contact à la fin de l’article.

Une chose est sûre, on n’a pas du tout regretté d’être venus ! Cette démonstration de kimono était vraiment instructive et intéressante, sans parler de la beauté des tissus…


Je tiens à souligner que les Japonaises venues donner les explications, pendant que madame Hiromi s’affairait, ont fait l’effort de présenter à la fois en français et en néerlandais. Cela m’a beaucoup touché car cela démontrait une volonté de rendre l’art de porter le kimono accessible au plus grand nombre !


Sans plus attendre, voyons ensemble quelques informations générales si vous le voulez bien…


Tout d’abord, le mot « kimono » signifie « quelque chose que l’on porte [sur soi] » et désigne un vêtement en forme de T avec des manches tombantes que l’on noue à la taille au moyen d’une ceinture « Obi ».

Historiquement, l’étude du terme de « kimono » est très intéressante. En effet, Madame Nagasaki Iwao, dans l’Introduction du livre intitulé « Kimonos » et paru aux éditions « La bibliothèque des Arts » en 2015, nous dit ceci : « Le terme « kimono » apparait pour la première fois dans les sources documentaires du XIIIe siècle.

Il se réfère alors à l’habillement en général, plutôt qu’à un type particulier de vêtement. Pendant la période Momoyama, le mot figure dans les rapports des missionnaires portugais pour décrire la forme et l’apparence spécifique, suggérant qu’à ce moment-là, le kimono était devenu synonyme de « Kosode ».

Mais qu’est-ce qu’un « Kosode » (小袖) ? Il s’agit d’un terme générique qui désigne tous les vêtements longs fabriqués avant l’ère Meiji (1868-1912) et qui signifie littéralement « petites manches », renvoyant aux ouvertures relativement étroites pour le passage des mains et des bras. De ce fait, il ne fait pas référence à la longueur de celles-ci.

Son emploi remonte à la période Heian et était porté par l’aristocratie comme vêtement de dessous. La mode vestimentaire évolua au fil du temps et le « kosode » incarna le reflet des changements politiques d’une société en mouvement pour devenir petit à petit le principal vêtement extérieur utilisé dans toutes les couches de la société à partir du XVIe siècle.

Comme l’auteure de l’extrait le souligne, on assiste à un glissement de signification entre les termes de « Kosode » et de « Kimono ». Elle poursuit en précisant « Mais c’est véritablement au cours de la période Edo que l’emploi de ce dernier se généralisa ». Au vu de ces informations, il existe donc une filiation directe entre ces deux notions.

Autrefois vêtement quotidien des Japonais, il n’est plus porté, malheureusement, que pour les occasions, les fêtes, les moments solennels, etc. C’est pourquoi, c’est si important de le (re)découvrir !

Bon à savoir…

Précisons que, contrairement à notre habitude occidentale, le mot kimono ne doit pas être confondu avec le nom des vêtements utilisés pour les arts martiaux (judôgi, karategi,…).

Il est important de savoir qu’il faut impérativement mettre le pan de tissu gauche par-dessus le droit ! Le contraire est réservé aux personnes défuntes…

Kimono ou Yukata?

N’étant pas habitués, nous, Occidentaux, pourrions facilement confondre le kimono et le yukata qui sont pourtant bien différents !

Le kimono est fait dans un tissu précieux, généralement de la soie et richement décoré. Il se porte obligatoirement par-dessus un sous-vêtement nommé « nagajuban » qui a pour mission de protéger le kimono de la transpiration entre autres.

D’ailleurs, on l’aperçoit au niveau du col, c’est la doublure blanche sous le beau tissu du kimono.

Avec le kimono, on porte également des tabi blanches (chaussettes avec une séparation entre le gros orteil et les autres) et des geta (sandales en bois avec une lanière passant entre le gros orteil et les autres). Le kimono est porté pour des occasions formelles.

Le yukata, en revanche, est un vêtement décontracté, généralement en coton qui se porte sans « nagajuban » ; les tabi ne sont pas obligatoires.

Pour encore un peu corser l’histoire, sachez qu’il y a plusieurs sortes de kimono mais nous n’allons pas toutes les détailler ici. Retenons déjà celles-ci :

  • Kurotomesode : kimono noir avec des motifs uniquement sous la taille, réservé aux femmes mariées. Utilisé pour les occasions très formelles.
  • Tomesode : Kimono d’une autre couleur que le noir avec des motifs uniquement sous la taille, réservé aux femmes mariées. Utilisé pour les occasions formelles
  • Furisode : Kimono aux motifs plus colorés, ayant de plus longues manches, réservé aux femmes célibataires et jeunes (avant la trentaine). Utilisé pour les occasions formelles
A gauche : yukata – A droite : kimono furisode

Arrêtons-nous un instant sur les motifs décoratifs. Reconnaissez-vous la fleur ci-dessous ? Il s’agit de l’espèce considérée comme la reine des fleurs, la pivoine, « Botan » (牡丹).

Emblématique du printemps, ces pétales créent une impression de grande dignité et de prospérité.

C’est bien beau tout ça mais comment le porte-t-on, ce kimono ?

Grâce à Hiromi-san et ses amies du CISM.be, on a vu à quel point c’est technique et précis de revêtir un kimono. Voyez plutôt :

Notez le Kurotomesode porté par Hiromi-san

Elles nous ont expliqué que la silhouette idéale pour que le kimono tombe bien est une silhouette cylindrique.

Pour cette raison, on attache des essuies à la taille de cette jeune dame pour combler le creux naturel à ce niveau. On utilise des cordons pour bien les fixer, il ne faudrait pas qu’ils tombent !

A l’étape suivante, on ferme le nagajuban en prenant bien soin de croiser le pan gauche au-dessus du droit. On utilise de longues et fines bandes de tissu pour bien le fermer.

Il est temps de mettre le kimono proprement dit. Notons que le tissu est trop long et arrive au sol. C’est tout à fait normal, cela permet d’ajuster le vêtement à la hauteur de la personne qui le porte.

Pour se faire, on utilise de nouveau de longues bandes de tissus, deux pour être exact. Une par-dessous pour ajuster la hauteur et une par-dessus pour bien maintenir le tissu et que le tout ne s’ouvre pas.

Remarquons les très belles fleurs de cerisier qui ornent ce kimono.

Du fait de sa durée de vie éphémère, elle est souvent comparée aux samouraïs qui étaient prêts à mettre leur vie en péril pour leur maître, ce qui en fait donc un important symbole de loyauté.

Dans les représentations artistiques, les fleurs de sakura ressemblent à s’y méprendre aux fleurs de prunier mais la différence la plus facilement reconnaissable est que la fleur de cerisier présente un léger retrait au centre de chaque pétale, tandis que les pétales de la fleur de prunier sont parfaitement ronds. Maintenant, vous ne pourrez plus vous tromper 😉

Reprenons notre premier mannequin pour voir la dernière étape de l’habillage avec le kimono : la mise en place de la ceinture obi et de son noeud à l’arrière.

On utilise un obi-makura, petit coussin (ici en vert pâle) afin de donner du volume au noeud de l’obi et aider à le maintenir. On termine en nouant l’obijime (dans les mains de Hiromi-san), un cordon décoratif en soie. Il termine joliment la tenue et maintient en place l’obi.

Voici le noeud de l’obi terminé. C’est beau n’est-ce pas?

Pour aller plus loin…

Il faut beaucoup de savoir-faire pour réussir à bien mettre en place le kimono et nouer joliment l’obi.

Hiromi-san donne d’ailleurs des cours pour enseigner cela et se fait un plaisir de partager ainsi sa culture. Qui parmi vous voudrait assister à l’un de ces cours ?

Si vous êtes intéressé(e)s par le sujet des kimono, voici quelques liens pour pouvoir prendre contact avec Hiromi-San ou ses amies du CISM.be:

Instagram de Madame Himori: https://www.instagram.com/kimono_madamehiromi/?hl=fr

Boutique de Madame Himori sur Instagram: https://www.instagram.com/lartdukimono/?hl=fr

Compte Facebook de Madame Himori: https://www.facebook.com/hiromi.fujiwara.902

Boutique de Madame Himori sur Facebook: https://www.facebook.com/search/top?q=l%27art%20du%20kimono

Page Facebook du CISM.be:

https://www.facebook.com/cism.be

Itchiku Tsujigahana : From shadow to light

“Fabric of Light. Itchiku Tsujigahana”, here is the title of the book that caught my eye in the middle of a myriad of bookshelves. It was sitting right there, in a former bookshop of Namur. I went through my precious find quickly and slowly at the same time. That growing feeling of curiosity has been quickly replaced by awe and amazement. A sophisticated, colourful and unexplored world was slowly but surely revealing itself in front of my overwhelmed eyes. This is how I began to discover what was hiding behind this title. The story of a man promoted to the rank of master, along with a method whose name is of obscure significance that will ironically allow him to come out of the shadow and step into the light all the way through Europe.

Let’s start our journey with the master Kubota Itchiku (久保田一竹, 1917-2003). His artistic path began very early in 1931 with the master Kobayashi Kiyoshi (小林清師) via the study of Yûzen (友禅) and Rôkechi (﨟纈) processes. Those two dyeing methods have direct filiation. The first one is characterised by the making of paste resist on the decorative patterns to protect these during the dye baths immersion. It is thus named by the one who modernized it in 1700, the Kyoto fan painter Miyazaki Yûzen (宮崎友禅, active from 1684 to 1703). The second one is older, its usage dating back to the days of Nara and is, for its part, a wax-resist.

Then, in 1934, he increases his artistic knowledge by studying figurative painting under the guidance and instructions of Ohashi Gekko (大橋月皎). Besides, in 1936, he began to study landscape painting, sansuiga (山水画) and suibokuga (水墨画), under the teaching of Kitagawa Shunko (北川春耕). Although at the end of the 18th century, Japanese landscape painting is influenced by Western realism, this movement is usually characterised by the idealized representation of reality with the use of specific shapes such as mountains, clouds, streams, etc. The same applies to the suibokuga painting in which landscapes are made with Chinese ink by playing on gradients to bring light and dark within the composition.

After discovery of his background and amazing career, I cannot help but think of other great names of the Japanese art like Ogata Kôrin (尾形光琳, 1658-1716) or Shibata Zeshin (柴田 是真, 1807-1891). The first one gave origin to the Rinpa school of painting and created lacquers of exquisite quality. The second one, man of many talents, definitely marked the 19th century. I’m neither an art historian nor an expert but, in my opinion, they do have a commonality : their study of painting leaving a mark in their work. Indeed, Louis Gonse (1846-1921) in his book “the Japanese art” described decorative arts as follows: “Any artist is a painter before being carver, lacquerer or ceramicist”. He adds: “Japan has such an amazing quality in the selection of its artists that it led to universality of abilities not often encountered with us”. Those were the words written by the author in 1883, which I believe continue to resonate this day seeing the career of Kubota Itchiku.

His discovery of the Tsujigahana process took place in 1937 at the Tokyo National Museum. There, in a display case, he saw a fragment of fabric whose brilliance sparked a great fascination within himself. The magic happened and never left his mind once. Not while he was doing his military service in 1938, neither during his mobilisation in 1944, or even throughout his detention in Siberia in 1948 after World War II.

Upon his return, and for about twenty years, he devoted himself to bring that lost in time process back to life. However, he didn’t want to meticulously use the original method step by step. His goal was the rebirth of its beauty via modern dyeing techniques, which gave rise to the Itchiku Tsujigahana. By combining tradition and modernity, the master paid tribute to this forgotten know-how.

Let’s continue our discovery with the original Tsujigahana (辻が花). It made its début at the beginning of the Edo period (1615-1868) and enhances the Yûzen process. Shrouded by an aura of light and mystery, the origin of the name itself is unclear.  The author Helen Benton Minnich, in her book “Japanese Costume and the Makers of Its Elegant Tradition” published in 1963 put forward two main hypotheses. The first one refers to an intertwined flowers pattern which finds its meaning in the kanji « 辻 » and the flower « 花 ». The second one, for its part, is related to “Tsutsujigahana” (つつじが花) which refers to objects dyed in red, similar to azalea flowers.

From a technical perspective, this one is based on the tie and dye method which consists of coloured patterns being produced in the fabric by gathering together many small portions of material and tying them tightly with string before immersing the cloth in the dyebath. However, the Tsujigahana pushed the method to the pinnacle of its aesthetic outcome by adding additional techniques to bring more nuances and details. The use of golden and silver leaves or ink, drawings and embroideries for a better rendition can also be noticed.

Let us now return to the master’s creation: the Itchiku Tsujigahana. There are different production methods and the following explanations are a short summary of the different steps explained in the book presented in the introduction of this article. The preparation of the silk kimono and its homemade background pattern mark the beginning of the process. Then, different parts of the fabric are assembled and tied with yarns to form small bumps. The next step may vary depending on the desired aesthetic goal, but generally, colours are placed on the small bumps before being covered with yarns. Thus, the colour is protected from the dye bath.

After the dye bath, the kimono is steamed, aiming to stabilize the colour. Then ensues a series of rinses followed by drying periods. The purpose of this sequence of operations is twofold. Firstly, draining the silk will allow it to absorb other colours. Indeed, silk can only absorb a certain amount of dye. For an Itchiku Tsujigahana, the author specifies that the silk is rinsed about fifteen times.

However, to achieve the desired effect, the colour is applied thirty times, which means that the material is rinsed nearly four hundred times. Secondly, stretch drying will prevent the silk from shrinking. At last, the yarns are carefully removed to avoid damages on the fabric. Then, embroideries and gilding are added as the final touch. As you will have gathered, creating a kimono takes a lot of time.

The final pieces definitely are unique items. A kimono isn’t simply a piece of clothing anymore but rather a true masterpiece. A striking and disconcerting beauty in which all aspects of nature are unveiled before our eyes in a poetry of colours. Plunge into the heart of Japanese aesthetics and feel the connection between nature, its beauty and Japanese society while admiring one of those kimonos.

The Master passed away in 2003 and could not achieve what seems to be the greatest project of his life: the “Symphony of Light”. It would be easy for me to explain his purpose but I urge you to explore the world of Itchiku Tsujigahana on your own. Imagine the different aspects of nature as an inseparable whole because when you look at a landscape, it is impossible to have an overview of everything that is taking place before your eyes. Take a look at the picture below and it will probably lead you to an awakening moment.

Our journey draws to a close, but the Tsujigahana Itchiku, for its part, travelled the world through multiple exhibitions that allowed the Western world to discover this extraordinary art. Thus, our beautiful country welcomed this unique collection several times. Firstly, in 1985, a first exhibition took place in Brussels at the INNO store. Secondly, in 1989, as part of the international exhibition Europalia. Finally, in 2016, at the Antwerp Fashion Museum.

This adventure of a lifetime was full of successes along with difficulties and while the work of the Master almost sadly vanished like its creator, Patokh Chodiev acquired the collection in 2010 and saved the Kubota Museum to promote and protect this unique art of the Japanese culture.

Nowadays, the Itchiku Kubota Art Museum, located near Lake Kawaguchi in the Yamanashi prefecture, opens its doors to visitors and allows everyone to enter the world of Itchiku Tsujigahana.

I would like to express my warmest thanks to Mr. Mudretsov Victor, a member of the International Chodiev Foundation, for all the photographs that illustrate this article and for sharing his knowledge.

Author: Sébastien Bourgeois

Translator: Flore Wiame

You can find further information on the collection and the International Chodiev Foundation via the following links:

Photo credits: The Kubota Collection

Itchiku Tsujigahana: de l’ombre à la lumière

« Tissus de Lumière. Itchiku Tsujigahana », tel est le titre du livre qui attira mon regard alors qu’il trônait sur l’une des nombreuses étagères d’une ancienne librairie de la ville de Namur… Tel un trésor, je le parcourus lentement et bien vite, la curiosité fit place à l’émerveillement car se dévoilait sous mes yeux un monde insoupçonné, raffiné, coloré qui me submergea totalement…  Ainsi, point de départ de cette fabuleuse découverte, cet ouvrage au titre bien mystérieux cache l’histoire d’un homme élevé au rang de Maitre et d’un procédé au nom obscur mais dont la rencontre permit à ce dernier de sortir de l’ombre et de rayonner jusqu’en Europe…

Commençons ce voyage par le Maitre, Kubota Itchiku (久保田一竹, 1917-2003). Son parcours artistique commença très tôt, en 1931, par l’étude des procédés Yûzen (友禅) et Rôkechi (﨟纈) auprès du Maitre Kobayashi Kiyoshi (小林清師). Ces deux techniques de teinture possèdent une filiation directe. En effet, la première est caractérisée par la réalisation de réserves en pâte sur les motifs décoratifs afin de protéger ceux-ci durant l’immersion dans les bains de teinture et ainsi nommée par celui qui la modernisa en 1700, le peintre d’éventail de Kyôto, Miyazaki Yûzen (宮崎友禅, actif entre 1684 et 1703). La seconde est plus ancienne, son emploi remontant à l’époque de Nara et constitue aussi une technique de réserve, à la cire.

Ensuite, en 1934, il enrichit son savoir artistique par l’étude de la peinture figurative sous les enseignements de Ohashi Gekko (大橋月皎). Puis, en 1936, il entama l’étude de la peinture de paysage, sansuiga (山水画) et suibokuga (水墨画), sous la direction de Kitagawa Shunko (北川春耕). Bien qu’à la fin du XVIIIe siècle, la peinture japonaise de paysage sansuiga subit l’influence du réalisme occidental,  ce courant se caractérise traditionnellement par la représentation d’une nature idéalisée en recourant principalement aux formes des montagnes, des nuages, des cours d’eau etc. Il en va de même pour la peinture suibokuga dans laquelle les paysages sont réalisés à l’encre de Chine en jouant sur les dégradés pour apporter ombre et lumière à la composition.

À la lueur des premières étapes de son formidable parcours, je ne peux m’empêcher de penser à d’autres grands noms de l’art japonais comme Ogata Kôrin (尾形光琳, 1658-1716), Shibata Zeshin (柴田 是真, 1807-1891)… Le premier donna naissance à l’école de peinture Rinpa et fut l’auteur de laques d’une qualité exceptionnelle. Le second, personnalité aux multiples talents, marqua le XIXe siècle dans différents domaines. Je ne suis pas historien de l’art ni un expert mais je pense qu’il est possible de leur dégager un point commun, leur étude de la peinture qui imprima sa marque dans leur œuvre. En effet, Louis Gonse (1846-1921), dans son ouvrage intitulé « L’art japonais » qualifiait les arts décoratifs en ces termes : « Tout artiste est d’abord peintre avant d’être ciseleur, laqueur ou céramiste ». Il poursuit en ajoutant : « La qualité d’artistes entrainait au Japon une sorte d’universalité d’aptitudes que l’on ne rencontre chez nous qu’à l’état d’exception ». Tels furent les mots que l’auteur écrivit en 1883 mais qui, je le pense, font encore écho aujourd’hui au regard du parcours de Kubota Itchiku.

Sa rencontre avec le procédé Tsujigahana eut lieu en 1937 au Musée National de Tokyo. Là, dans une vitrine, il découvrit un fragment de tissu dont l’éclat exerça sur lui une véritable et totale fascination. La magie opéra et occupa son esprit pendant plusieurs années, de son service militaire en 1938, en passant par sa mobilisation en 1944 et jusqu’à la fin de sa détention en Sibérie en 1948, après la Seconde Guerre mondiale.

À son retour au Japon et pendant près de vingt ans, il se consacra à faire revivre ce procédé oublié. Toutefois, le but qu’il poursuivit ne fut pas la réintroduction de la technique originelle mais bien la renaissance de la beauté de celle-ci par le biais des techniques de teintures modernes, ce qui donna naissance à l’Itchiku Tsujigahana. Véritable hommage à ce savoir-faire perdu dans le temps, le Maitre allia tradition et modernité.

Poursuivons notre voyage et découvrons le Tsujigahana (辻が花) originel qui se développa aux XVe et XVIe siècle avant de disparaître au début de la période Edo (1615-1868) au profit du procédé Yûzen. Entouré d’un véritable halo de mystère, l’origine même du nom est incertaine. L’auteure Helen Benton Minnich, dans son livre « Japanese Costume and the Makers of Its Elegant Tradition » et paru en 1963, nous livre deux hypothèses principales. La première renverrait à un motif de fleurs entrecroisées qui trouve sa signification dans les kanji « 辻 », croisement et « 花 », fleur. La seconde serait à mettre en relation avec le terme de « Tsutsujigahana » (つつじが花) et ferait référence à des objets teints en couleur rouge, semblable à la couleur des azalées.

D’un point de vue technique, celle-ci se base sur la teinture de type tiedye qui consiste à nouer des portions de tissu à l’aide de ficelles avant de les immerger dans le bain de teinture. Les portions nouées sont ainsi protégées des colorants, ce qui permet de créer des jeux de nuances dans les motifs décoratifs. Toutefois, le Tsujigahana poussa ce procédé au summum de son aboutissement esthétique de par l’ajout de techniques annexes pour apporter davantage de nuances, de détails, de rendu comme l’emploi de feuilles d’or, d’argent, l’ajout de broderies, de dessins à l’encre.

Revenons maintenant à la création du Maitre, l’Itchiku Tsujigahana. Il existe différentes méthodes de fabrication et celle qui suit est un bref résumé des différentes étapes expliquées dans le livre qui servit d’introduction à cet article.

Le point de départ est la préparation du kimono en soie sur-lequel un motif de fond est réalisé. Ensuite, différentes parties du tissu sont rassemblées et nouées à l’aide de fils de manière à former de petites bosses. L’étape suivante peut varier en fonction du but esthétique recherché mais des couleurs sont posées sur ces petites excroissances avant d’être elles-mêmes recouvertes de fils qui protégeront la couleur du bain de teinture. Après ce bain, le kimono est alors passé à la vapeur, ce qui a pour effet de stabiliser la couleur. S’ensuit alors une succession de rinçages suivis de périodes de séchage. Le but de cette succession d’opérations est double. Premièrement, dégorger la soie va lui permettre d’absorber d’autres couleurs car du fait de ses caractéristiques, elle ne peut absorber qu’une certaine quantité de teinture. Pour la confection d’un Itchiku Tsujigahana, la soie est rincée environ quinze fois. Toutefois, pour obtenir les effets désirés, la couleur est appliquée trente fois, ce qui signifie que la matière est rincée près de quatre cent fois. Vous l’aurez compris, la réalisation d’un tel kimono demande beaucoup de temps. Deuxièmement, le séchage par étirement va empêcher à la soie de rétrécir. Enfin, le fil est retiré avec précaution pour éviter d’abimer la matière et des finitions sont apportées avec de la broderie, de la dorure par exemple.

Il en résulte des pièces d’une beauté saisissante et déroutante, transformant le kimono en véritable tableau de maitre dans-lequel les aspects de la nature se dévoilent sous nos yeux dans une véritable poésie de couleurs. Admirer l’un de ces kimono, c’est plonger au cœur de l’esthétique japonaise, ressentir le lien étroit qui subsiste entre la nature, sa beauté et la société japonaise. Le Maitre quitta ce monde en 2003 et il ne put mener à son terme ce qui semble être le plus grand projet de sa vie, la « Symphonie de lumière ». Il me serait facile de vous exposer son dessein mais immergez-vous dans le monde d’Itchiku Tsujigahana, imaginez les différents aspects de la nature comme un tout indissociable car lorsque vous regardez un paysage, il est impossible d’avoir une vue d’ensemble de tout ce qui se déroule sous vos yeux… Posez votre regard sur la photo ci-dessous et vous comprendrez…

Notre voyage touche bientôt à sa fin mais l’Itchiku Tsujigahana, lui, voyagea dans le monde entier par le biais de multiples expositions qui permirent au monde occidental de découvrir cet art hors du commun. Ainsi, notre beau pays accueillit à plusieurs reprises cette collection. Tout d’abord, en 1985, une première exposition se déroula à Bruxelles au magasin INNO. Puis, en 1989, dans le cadre de l’exposition internationale Europalia. Enfin, plus récemment, celle-ci fut visible en 2016 au Musée de la Mode d’Anvers.

Cette aventure fut jalonnée de réussites et de difficultés et bien que l’œuvre du Maitre faillit sombrer à son tour, Monsieur Patokh Chodiev acquit la collection en 2010 et sauva le musée Kubota dans un souci de préservation et de promotion de cet art unique et de la culture japonaise. Aujourd’hui, le musée d’art Itchiku Kubota, situé près du lac Kawaguchi dans la préfecture de Yamanashi continue d’ouvrir ses portes aux visiteurs et permet à tout un chacun d’entrer dans l’univers d’Itchiku Tsujigahana.

Je tiens à remercier Monsieur Mudretsov Victor, membre de la Fondation Internationale Chodiev, pour l’ensemble des photographies qui illustrent le présent article ainsi que pour le temps qu’il m’a accordé.

Auteur : Sébastien Bourgeois

Vous retrouverez plus d’informations sur la collection et la Fondation Chodiev en consultant les liens ci-dessous.

Crédits des photos: The Kubota Collection